Interview de François REBSAMEN dans le Bien Public
Le Bien Public : "De François à Ségolène" sort aujourd'hui en librairie, ce livre n'est-il pas qu'un exutoire après les défaites enregistrées par le parti socialiste le printemps dernier ?
FR : D'abord, même si elle très présente, ce n'est pas un livre sur la présidentielle. C'est une réflexion globale sur l'incapacité de la gauche à s'imposer durablement dans une élection qu'elle n'a gagnée qu'à deux reprises sur huit depuis la création de la Ve République. C'est aussi une recherche non pas en responsabilité individuelle mais en responsabilité collective et je me mets dans le collectif. Pour moi, la raison première de la défaite tient dans la division des socialistes depuis le référendum européen.
FR : D'abord, même si elle très présente, ce n'est pas un livre sur la présidentielle. C'est une réflexion globale sur l'incapacité de la gauche à s'imposer durablement dans une élection qu'elle n'a gagnée qu'à deux reprises sur huit depuis la création de la Ve République. C'est aussi une recherche non pas en responsabilité individuelle mais en responsabilité collective et je me mets dans le collectif. Pour moi, la raison première de la défaite tient dans la division des socialistes depuis le référendum européen.
BP : Au moins, cela vous permet de remettre quelques pendules socialistes à l'heure et de dénoncer certains comportements...
FR : Le parti socialiste est aujourd'hui rongé par l'explosion des égos. Nous ne sommes pas au bout de nos peines car il n'y a plus d'ambition collective. Je suis socialiste, je dis ce que je crois bon pour le parti socialiste. Certains ont eu des comportements qui ont nui à l'unité du PS. Je le constate, je le déplore et je le dénonce. Je livre ici mon vécu et mon ressenti.
BP : Vous vous imposez comme un ardent mais lucide défenseur de Ségolène Royal. On a l'impression que vous la connaissez par coeur. En dehors de François Hollande dont elle est désormais séparée, n'êtes-vous pas le mieux placé, le plus autorisé pour parler d'elle ?
FR : J'ai des relations amicales avec l'un et l'autre. Je précise, dès le début du livre, que je n'étais pas un intime du couple Hollande - Royal. Bien que j'y aie été invité plusieurs fois, je n'ai jamais mis les pieds dans leur appartement. Je ne suis d'ailleurs intime d'aucun haut dirigeant du parti socialiste car je sépare la vie privée de la vie publique et politique. Je ne veux pas mélanger les genres.
BP : Dès le début du livre, vous n'hésitez pas à évoquer cette rumeur persistante à Dijon qui vous prête une relation avec elle...
FR : Je ne sais pas qui a lancé cette rumeur. On dit que j'habiterais avec elle, que j'aurais divorcé. Ses enfants qui sont majeurs, sauf une, seraient scolarisés à Carnot sous de faux noms. C'est une histoire de fous totalement inventée. Je n'ai jamais eu la moindre relation personnelle avec Ségolène Royal. Je vis avec mon épouse, je suis bien avec elle. Je ne sais pas comment stopper cette rumeur et si ce que je vous dis pouvait y mettre un terme j'en serais très heureux. Dijon est une ville de rumeurs. Dans le passé, on y enlevait des jeunes femmes dans des cabines d'essayage. Mon prédecesseur, Robert Poujade, me disait récemment qu'on l'avait fait divorcer trois fois...
BP : Vous avez refusé tout récemment de commenter le divorce des Sarkozy. A l'inverse, vous faites une large et belle place aux relations Royal - Hollande...
FR : Aux relations politiques, oui. Privées, non. Par contre, si j'ai évoqué la séparation de François et Ségolène, c'est parce que cette dernière a été victime de malveillances dans l'annonce précoce qui en a été faite par l'Agence France Presse. Certains journalistes ont cru bon de lâcher l'information au soir du second tour des législatives. Ce carambolage de la séparation du couple avec des résultats électoraux inespérés a jeté le trouble chez la plupart des militants, qui ont cru que Ségolène avait elle-même choisi ce moment pour polluer une demi-victoire.
BP : "De François à Ségolène" ne se cantonne pas aux élections de mai et juin, il plonge le lecteur dans l'organisation passée, présente et àvenir du parti socialiste...
FR : Tout commence par le traumatisme du 21 avril 2002 et le départ que l'on croyait sincère de Lionel Jospin. Ce départ nous a empêchés de faire une véritable analyse de l'échec. Pire, nous avons foncé avec succès, têtes baissées, sur les élections régionales sans supposer que nous allions buter sévèrement sur le dossier européen. Le non respect du vote des militants socialistes par Laurent Fabius est, pour moi, à l'origine de la défaite. Les fondamentaux de l'échec étaient en place avant le début de la campagne de Ségolène Royal.
BP : Demain, le PS, c'est avec ou sans Ségolène Royal ?
FR : De toute façon, ça ne peut pas être sans Ségolène Royal. Elle a été battu, certes, mais honorablement. Avec 17 millions de voix, elle a fait mieux que tous ses prédécesseurs socialistes à l'élection présidentielle. Elle a fait un beau résultat quand on sait, qu'au premier tour, la gauche ne totalisait que 36 %. Le PS ne peut pas se passer de Ségolène Royal. C'est un fait. Maintenant, elle doit faire un travail d'analyse sur les erreurs qu'elle a pu commettre durant sa campagne.
BP : Demain, Ségolène Royal, c'est avec ou sans François Rebsamen ?
FR : Demain, je ferai le choix sincère de celui ou celle qui sera le mieux placé pour gagner. Si c'est Ségolène Royal, tant mieux. Si c'est un autre, tant mieux... Je n'ai pas d'état d'âme. Mais derrière tout cela se pose le problème des alliances. Le parti socialiste doit maintenant réfléchir à une stratégie de conquête du pouvoir. Il est donc temps de regarder ce qui se passe au centre à condition que le centre de François Bayrou précise aussi ses intentions.
Extrait du Bien-Public du 24/10/2007