Hôpitaux : deux morts, beaucoup de com', et pas mal de mauvaise foi
Un UMP masqué, un urgentiste énervé, une ministre accrochée à sa loi
En moins d'une semaine, un enfant de trois ans et un homme de 57 ans sont décédés en région parisienne suite à un dysfonctionnement du système hospitalier. Ces deux morts ont fait renaître le débat explosif sur l'organisation et la qualité des soins dans les hôpitaux publics. Face à face : les syndicats médicaux, notamment ceux des médecins urgentistes, et la ministre de la Santé Roselyne Bachelot. Pour défendre ses positions dans les médias, chacun a sorti ses arguments, parfois au mépris de la bonne foi. Tentative de clarification.
Le débat fait périodiquement la une des médias. Il est réouvert : les urgences sont-elles saturées dans les hôpitaux ? C'est ce qu'a affirmé l'Association des médecins urgentistes de France (Amuf) en braquant les projecteurs, via un communiqué, sur une mort qui aurait peut-être pu être évitée. Le 28 décembre au matin, Jean Lagrange, 57 ans, est décédé six heures après avoir été pris en charge par le Samu de l'Essonne suite à un malaise cardiaque. Pendant plus de quatre heures, le Samu avait cherché, en vain, une place dans un service de réanimation, appelant 24 hôpitaux d'Ile-de-France. A cinq heures du matin, une place s'était finalement libérée à l'hôpital Bichat, à Paris, mais trop tard : l'homme est décédé dans l'ambulance qui l'emmenait réaliser un examen coronaire dans un autre établissement.
L'Amuf est présidée par Patrick Pelloux, très médiatique depuis qu'il a annoncé, le premier, la vague de mortalité déclenchée par la canicule en 2003. Les membres du syndicat sont en grève depuis le 1er décembre pour protester contre les restrictions budgétaires et les fermetures de services. Ils estiment que, faute de moyens, de personnel présent et donc de lits ouverts, « la sécurité des patients n'est plus assurée dans les hôpitaux en Ile-de-France pendant cette période de fêtes ». Le président de Samu de France, Marc Giroud, a lancé une « alerte rouge » avant le « double pont du Jour de l'An », demandant « la réouverture des lits de réanimation qui ont été fermés tout à fait à tort pendant cette période de forte activité saisonnière ». La Mutualité française, qui fédère les mutuelles santé, a déploré pour sa part « la dégradation de la qualité des soins en France ». Et la veuve du patient a porté plainte contre X, pour non assistance à personne en danger.
Les télés ont pu compter sur un homme pour porter la contestation face à ces bruyantes protestations. Il s'agit de Philippe Juvin, chef du service des urgences à l'hôpital Beaujon, à Clichy (Hauts-de-Seine).
Juvin estime que l'hôpital ne manque pas de moyens, mais que c'est l'organisation qui est fautive. Mise en garde contre « l'utilisation » politique de la mort d'un patient, constat qu'il manque « un pilote » pour coordonner la répartition des lits, défense de la future « loi Bachelot », qui devrait être présentée au Parlement en janvier... Autant d'arguments qui fleurent bon le discours politique. C'est normal : ils ont déjà été développés dans un communiqué de l'UMP... par Juvin lui-même !
Car le chef de service n'est pas un simple professionnel du milieu hospitalier : il est aussi secrétaire national de l'UMP, et membre du comité exécutif du parti (sans oublier ses mandants de secrétaire départemental adjoint de l'UMP dans les Hauts-de-Seine, vice-président du Conseil Général des Hauts-de-Seine, et maire de La Garenne-Colombes, comme le signale son blog et cette page alimentée par une « jeune UMP »). Mais à la différence de TF1, ni France 2, ni France 3 n'ont mentionné ses responsabilités politiques.
Source : Arrêt sur Images