L'été sera chaud !
Par Najat Belkacem
Bonsoir à toutes et à tous ! Il y a des semaines comme ça où l'actualité semble prendre une densité extraordinaire, les événements se percutent, se télescopent, se chassent pour laisser la place à une nouvelle information plus fracassante que la précédente.
De ce point de vue, ces dix derniers jours nous ont gâtés, du décès du moonwalker Michael Jackson_, en passant par le discours de Nicolas Sarkozy devant le Congrès, jusqu'à la condamnation de Madoff à 150 ans de prison. Et c'est sans évoquer la propagation de la pandémie H1N1, la révolution silencieuse et admirable des Iraniens, le remaniement ministériel avec la nomination de Frédéric Mitterrand (prononcer Mitran ?), la baisse de la TVA dans la restauration (3 milliards € pour un engagement de 40.000 emplois créés en 2 ans…) ou l'emprunt_ annoncé à Versailles par le Président de la République.
- Les emprunts ruse…
Parlons-en de cet emprunt justement, dont le gouvernement vient d'annoncer qu'il ne serait pas lancé avant 2010, risquant au passage de rater son objectif de relance pour venir grever un peu plus encore les déficits publics. Utiliser les déficits publics pour relancer la croissance, c'est comme sauter sur un trempoline, il faut sauter suffisamment fort pour rebondir, mais pas trop pour ne pas crever la toile... Un emprunt paré de toutes les vertus, destiné à financer des investissements productifs et porteurs de croissance et qui se distinguerait de celui, honni, qui financerait le train de vie de l'État. Rien à dire sur le principe.
Mais quelle belle hypocrisie lorsque l'on sait que l'État emprunte chaque jour plusieurs milliards d'euros sur les marchés internationaux pour financer son fonctionnement et que les seuls intérêts de la dette publique ont coûté aux contribuables 54 milliards d'euros en 2008. Vivre à crédit c'est payer toute dépense 1,2 à 1,5 fois sa valeur réelle, selon les taux auxquels l'État emprunte. Un porte avion à 1 milliard coutera en réalité aux contribuables sur plusieurs générations 1,5 milliard... Les emprunts d'aujourd'hui sont toujours les impôts de demain, même s'il est vrai que réduire les déficits maintenant risquerait d'approfondir la crise.
Quelle ironie aussi d'annoncer à grands cris un nouvel emprunt au moment même ou le Premier ministre déclare que les déficits structurels de la France ont atteint « des niveaux qui peuvent compromettre la survie même de nos systèmes économiques » et alors que la dette publique a augmenté de 86,5 milliards en 3 mois !.
Quelle belle erreur ensuite que de financer ces investissements par un grand emprunt alors que chacun sait qu'il en coûtera plus cher à l'Etat que de recourir aux marchés...
Quelle indécence enfin de recourir à l'emprunt alors que le gouvernement pourrait financer ces investissements, croissance verte, biotechnologie, technologies numériques, en remettant en cause le bouclier fiscal. Plutôt que d'augmenter les impôts des plus riches, il offre aux rentiers une nouvelle occasion de placement ! 82% des Français n’auraient pas l’intention de souscrire à l’emprunt lancé par l’Etat, pour les 18% restant voilà une occasion supplémentaire de s'enrichir plus certainement que chez le très respectable Monsieur Madoff !
- Qu’est-ce qu’elle a ma gueule ?
On savait la France brocardée pour l’état de ses prisons par l’observatoire international des prisons ou pour ses violences policières par Amnesty international, on nous apportait la preuve ces derniers jours que la police contrôlait au faciès ou, pour dire plus pudiquement les choses, faisait du profilage ethnique !
Selon cette étude, la probabilité d’être contrôlé serait globalement 7,8 fois supérieure pour un arabe (selon les termes de l’étude) et 6 fois plus pour les Noirs que pour un blanc. Chiffres hallucinants qui en disent long sur le sentiment de harcèlement dont sont victimes beaucoup de nos concitoyens. Une pratique inadmissible contraire à la législation nationale française anti-discrimination et au Code de déontologie de la police.
Le rapport de l’Open Society Institute précise que ce délit de « sale gueule » se double d’un délit de « sale fringue », l’apparence vestimentaire étant une occasion de plus de contrôle. Une pratique policière inefficace perpétue les stéréotypes sociaux et raciaux et cristallise animosité et tension entre la population et sa police. Un rapport à lire….
- Révision des lois de bioéthique
Les sciences du vivant connaissent une révolution sans précédent dans l’histoire de l’humanité, avec des conséquences majeures dans la vie quotidienne de chacun d’entre nous, en France, en Europe comme partout dans le monde.
Pour le meilleur, mais aussi pour le pire, les progrès de la médecine ne cessent d’interroger notre société, de bousculer nos repères, de modifier notre vision de l’homme et de remettre en cause les valeurs humanistes et républicaines auxquelles, nous socialistes, nous sommes tant attachés.
Dans le même temps que nous devons faire preuve de vigilance sur le plan moral et politique, nous ne saurions renoncer à ce qui fait aussi notre identité depuis toujours : la foi dans le progrès, la connaissance et la capacité de l’homme à bâtir une société meilleure.
Les tests ADN, la brevetabilité du vivant, la gestion pour autrui, les recherches sur les cellules souches ou les embryons, par exemple, nous obligent donc sans cesse à repenser la société dans laquelle nous vivons, et à préparer le monde que laisserons à nos enfants.
C’est tout l’enjeu des débats en cours sur la révision des lois portant sur la bioéthique, dans des conditions qui ne sont pas à la hauteur des défis qui sont devant nous, notamment sur le plan de la démocratie et de la participation des citoyens.
Encourager la recherche, encadrer les expérimentations scientifiques, garantir l’accès du plus grand nombre au progrès médical, mais aussi garantir le respect des droits de la personne humaine et des libertés fondamentales de chaque citoyen sont autant de sujets qui exigent un débat ouvert, transparent et exigeant. Un débat auquel les socialistes se doivent de participer dès maintenant si nous voulons être mesure d’apporter, demain, des réponses aux questions de notre temps.
Engagée dans ce dossier important au titre de mes responsabilités sur les questions de societé à la Direction du PS, j'ai souhaité, avec Bertrand Monthubert, secrétaire national en charge de l’Enseignement supérieur et à la recherche que le Parti socialiste mène une large consultation sur la bioéthique dans le cadre du projet de société qu’il s’est engagé à construire.
Je vous invite à la lecture du dernier numéro de l’hebdo des socialistes consacré à ce dossier important et je vous donne rendez vous à la rentrée pour une conférence cadre qui au-delà de la bioéthique posera la question du rapport entre socialisme, science et éthique au XXIème siècle.