Restauration : une baisse difficile à encaisser
Baisse des prix dans la restauration : l'histoire d'un mensonge bien ficelé.
Une patate chaude, brûlante même. La TVA dans la restauration a baissé de 19,6 à 5,5 % mais malgré les promesses, les prix n'ont quasiment pas bougé... sauf pour le gouvernement, qui continue de claironner que les tarifs ont chuté de 4 % ! Décryptage d'une tambouille aigre-douce qui a du mal à passer.
Une merveille de storytelling
La baisse de la TVA dans la restauration est inscrite au menu depuis le premier juillet. Moins d'une semaine après son entrée en vigueur, les enquêteurs de la DGCCRF étaient envoyés en expédition pour relever les prix des plats et vérifier l'application du "contrat d'avenir" passé avec les professionnels, une sorte de charte de bonne conduite non contraignante. Résultat : la baisse a été répercutée par un restaurant sur deux et les prix ont reculé de « 4 % en moyenne ». « Encourageant », pour Hervé Novelli, secrétaire d'Etat chargé du Commerce, de l'Artisanat et de plein d'autres trucs. Une victoire totale pour le consommateur ! Grâce à qui ? Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom, tout simplement.
Les restaurateurs se sucrent avec des additions toujours bien salées
Dans le monde réel, il s'avère que les choses sont un tantinet différentes. D'après les relevés de l'INSEE, les prix ne baissent que de 1,3 % dans la restauration et de 0,7 % dans les cafés. Sachant que les prix à la consommation ont globalement chuté de 0,4 % en juillet, la baisse est donc quasi-nulle. Les restaurateurs « ont un contrat avec le pays. C'est du donnant-donnant, on ne peut pas recevoir sans donner » a déclaré Christine Lagarde. La preuve que si. Une mesure qui coûte 2,5 milliards d'euros à l'État, et qui ne bénéficie pas aux consommateurs, malgré moultes promesses. Voilà qui la fiche mal.
Un mensonge bien ficelé
On nous raconterait des salades ? Si peu... En réalité, le ministère de l'Economie a élaboré un système imparable : il base ses calculs sur un « cadre analytique de suivi de l'évolution des prix des produits ». En clair : les restaurateurs souhaitant participer à l'opération ont fait passer une liste de un à sept produits sur lesquels ils acceptent d'être contrôlés... Les autres établissements ne sont pas pris en compte, pas plus que les plats non référencés des volontaires. De peur d'une indigestion ?
Ne pouvant que constater la manipulation après-coup, les syndicats de la DGCCRF sont montés au créneau en dénonçant la « manipulation du gouvernement ». La CGT note ainsi, un brin cynique, que la charte mise en place par le gouvernement incite les restaurateurs à pratiquer ce qui « ressemble à un prix d'appel, voire à une pratique commerciale déloyale ». Un comble ! Le syndicat rappelle en outre que s'il y a une baisse qui n'est pas contestable, c'est bien celle de ses effectifs, qui ont fondu de 7 % entre 2007 et 2008. A la limite du plan social. Et l'an prochain, inspecteurs et contrôleurs de la DGCCRF seront placés sous l'autorité des préfets départementaux, perdant toute cohésion nationale.
Et les consommateurs en seront réduits à boire un bouillon...
(Article publié sur le site « Les mots ont un sens »)