Nicolas Sarkozy : de la volonté de puissance à la tentation de l’autoritarisme

Publié le par Dominique Millécamps

I) Nicolas Sarkozy, une ambition boulimique

Une obsession : « Je veux… »

Après étude statistique, la formule « je veux » représente 1,25% de tous les mots employés par NS. A titre de comparaison, la « France », objet de cette volonté, ne représente que 0,56% des mots employés. Sa posture volontariste est son premier article de vente.

Cette mise en scène de soi comme incarnation d’une volonté inflexible lui permet d’escamoter la plupart des critiques sur son bilan aux affaires.

Ainsi, quand il évoque son bilan à l’Intérieur, NS demande à être jugé sur ses intentions (lutte contre l’insécurité et l’immigration) plus que sur les résultats de son action (quadrillage policier aussi incessant qu’inutile, lois s’empilant les unes sur les autres, etc.). Difficultés et échecs sont toujours à rejeter sur les autres (les juges, les éducateurs, les autres pays,...). Privilégiant une éthique de conviction sur une éthique de responsabilité, NS illustre en permanence la confusion entre vouloir et agir.

Cette posture lui permet aussi d’escamoter les dérives personnelles d’une ambition effrénée.

Sa formule magique « Je veux être le Président » représente à elle seule 0, 68 »% de tous les termes qu’il emploie ! « La seule chose qui m’intéresse, c’est d’être un jour président de la République. » (Le Parisien, 11/03/2005). La franchise de l’aveu permet de masquer sa mégalomanie et son goût pour les fastes du pouvoir qu’il a montré et montre dans toutes ses fonctions ministérielles. Ce n’est pas demain que les dépenses de l’Élysée seraient réduites !

II) Entre concentration des pouvoirs et confusion des genres

Son ambition sans borne l’amène à cumuler les mandats et les fonctions (mairie de Neuilly, présidence du Conseil Général des Hauts de Seine, ministre d’Etat, président du parti majoritaire) sans se soucier des conflits d’intérêt ni des mélanges de genre.

Ainsi, son mépris de la séparation des pouvoirs, avec ses mises en cause répétées des juges, qu’il critique pour leur prétendu laxisme alors même qu’ils n’ont jamais été aussi répressifs (10 000 détenus de plus sur 2002-07). « Le président du tribunal de Bobigny refuse de condamner les multirécidivistes, il faut le remplacer ! » (A vous de juger, 30/11/2006).

Ainsi, son utilisation des moyens de l’Etat à des fins personnelles et partisanes, avec l’instrumentation des RG, pour se défendre (« Je vais redevenir le patron de ceux qui ont fait des enquêtes sur moi. Certains doivent mal dormir depuis qu’ils savent que je reviens » déclare-t-il au Parisien en 2004) comme pour attaquer (l’espionnage de l’entourage de SR).

Sa boulimie de pouvoir laisse bien mal augurer de ce que pourrait être l’autorité dans « l’État irréprochable » qu’il prône :

Ainsi, sa conception du rôle présidentiel comme celui d’un super premier ministre : « La démocratie irréprochable c’est un président qui s’explique devant le Parlement. C’est un président qui gouverne. C’est un président qui assume. On n’élit pas un arbitre mais un leader ». Comment croire en ce dirigisme omniscient qui a déjà échoué avec Juppé en 1995 ? La méthode est mauvaise, les conflits certains…

Ainsi, l’absence dans son projet (à la différence de SR) de toute mesure concrète pour rééquilibrer les pouvoirs. NS ne dit rien sur le rôle du Parlement, sur la nécessité de contre pouvoirs, sur la décentralisation de l’autorité, sur la démocratie participative, et tout simplement sur le rôle des citoyens dans la vie publique.

III/ Derrière, le tempérament autoritaire

Une agressivité verbale frisant l’hystérie

Ainsi, sa gestion des conflits dans les banlieues, où il joue le pompier pyromane (52 % des habitants de banlieue estiment que ce sont ses propos qui ont le plus contribué aux émeutes), multipliant provocations et amalgames (banlieues = immigration = délinquance = racaille).

Nicolas Sarkozy menace à l’occasion – et sur un ton très sérieux - toute personne susceptible de le gêner ou de l’interpeller sur son action.

« Un jour, je finirai par retrouver le salopard qui a monté cette affaire et il finira sur un crochet de boucher » (F.-O. Giesbert, la Tragédie du Président - à propos de Clearstream). Au Parlement, les socialistes sont accusés à plusieurs reprises de préférer « leur parti à leur pays ». Il a même menacé un député de l’opposition (Henri Emmanuelli), suite à une question au gouvernement, le 27/04/2004 : « Fais gaffe à toi, fais gaffe, fais bien attention à toi ! »

Nicolas Sarkozy recourt enfin facilement à l’intimidation et aux représailles

Ainsi, entre autres exemples, l’éviction d’Alain Genestar. Pour la première fois, l'ancien directeur de la rédaction de Paris Match, Alain Genestar, met publiquement en cause le rôle de Nicolas Sarkozy dans son licenciement : « Le ministre de l'Intérieur, quand il affirme n'être pour rien dans mon licenciement, ne dit pas la vérité » (Libération, 17/11/2006)

IV) Une réelle volonté de remise au pas du pays

A partir du constat que la France aurait besoin d’autorité (« Je sais que notre pays a un fort besoin d'autorité, il faut le satisfaire. » - Le Progrès, 23/02/2006), NS développe la vision d’un ordre social réactionnaire adossé à deux piliers principaux.

La criminalisation à tout va et la mise en place d’un ordre répressif dès la maternelle, avec une répression qui privilégie le « chiffre » et la mise en scène (« En affectant des CRS dans les banlieues sensibles (…), je fais de la police de proximité » - La Gazette des Communes, 21/11/2005), qui met les libertés en péril et attise les tensions entre la police et la population. Mieux , la santé publique et l’école passent au service du maintien de l’ordre : « Il faut agir plus tôt, détecter chez les plus jeunes les problèmes de violence. Dès la maternelle, dès le primaire, il faut mettre des équipes pour prendre en charge ces problèmes. Dès la maternelle ? Oui. » (Le Parisien, 2/11/2005).

La religion comme facteur privilégié d’encadrement social : « On ne peut éduquer les jeunes en s'appuyant uniquement sur des valeurs temporelles, matérielles, voire même républicaines (…) la dimension morale est plus solide, plus enracinée, lorsqu'elle procède d'une démarche spirituelle, religieuse » - in Nicolas Sarkozy. - La République, les religions, l'espérance. - p. 163) - avec une attention particulière à l’Islam : « Certains des jeunes dans les banlieues qui n’ont rien dans la tête… La religion peut être un soutien pour eux. » (Cent minutes pour convaincre, France 2, 9 décembre 2002).

Alors, oui, face à Nicolas Sarkozy, les Français peuvent vraiment s’inquiéter !

Publié dans Les autres candidats

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