Déclaration de Ségolène Royal après sa visite à Washington
Chères amies, chers amis,
Je viens de prendre connaissance des commentaires moqueurs sur les radios, ce matin, au sujet d’une de mes déclarations sur la campagne de Barack Obama, que j’aurais « inspirée ».
Je comprends que cette phrase ait pu surprendre ceux qui, à distance, n’avaient ni le son ni l’image : « Son ego est devenu totalement démesuré ! », se sont-il dit…
Alors, quelques précisions pour les rassurer.
Après une conférence de presse centrée sur le moment historique que nous vivions, moment auquel je participe au milieu du peuple américain, en toute humilité et sans protocole, c’est à une question amicalement provocatrice d’un des journalistes que j’ai répondu de façon humoristique ! Intention bien comprise par l'AFP, comme on peut le voir sur la vidéo de l'interview et comme en atteste la dépêche *.
Sur la campagne et l'utilisation d'Internet, c'est sans doute nous qui aurons à nous inspirer de Barack Obama, et peut-être même, ici ou là, à le « copier ».
La force de l’événement vécu ici et dans le monde m’a impressionnée… mais pas au point de perdre la lucidité !
Il y a bien d’autres événements majeurs à vivre… Comme, par exemple, cette interview très symbolique de Colin Powell sur CNN et je voudrais vous en dire quelques mots. Car elle est révélatrice du nouveau climat politique américain.
Dans cette interview, Colin Powell, ancien chef d’état-major interarmées et ancien secrétaire d’Etat de George W. Bush, a répondu sans détour sur la question de la perte de leadership moral des Etats-Unis, conséquence de la politique étrangère menée après 2001 (souvent contre l’avis de Colin Powell lui-même).
Il a reconnu dans une interview très forte, et avec beaucoup de calme que nombre de décisions de l’administration Bush avaient miné la position des Etats-Unis et décrédibilisé leur parole et leur influence dans le monde : l’invasion de l’Irak, les entraves aux droits de l’Homme à Guantanamo ou Abou Ghraib, les enlèvements secrets de personnes suspectées de terrorisme, leur internement secret et leurs tortures dans des prisons hors du territoire américain.
Il a salué la phrase du nouveau président Barack Obama selon laquelle « la sécurité de la nation ne pouvait pas être assurée aux dépends des libertés. »
Il a beaucoup insisté sur l’influence positive du trajet personnel de Barack Obama sur la jeunesse noire en particulier.
Dans un troisième temps, il a salué l’invitation lancée à John McCain de dîner avec les Obama la veille de l’investiture. Il a salué l’élégance du geste et de la réponse du challenger battu.
Colin Powell y a vu le signe de ce bipartisme dont l’Amérique et son président auront tant besoin pour vaincre la crise, intérieure et extérieure. D’ailleurs, les décisions que Barack Obama a prises dès aujourd’hui en sont le signe. D’une part, l’arrêt immédiat des interrogatoires musclés à Guantanamo. D’autre part, il a réuni les chefs d’état-major pour parler de l’Irak et de l’Afghanistan. Enfin, il a réuni ses conseils économiques pour continuer la mise au point, par le dialogue avec le Congrès, du plan de lutte contre la crise économique et financière.
J’observe que la crise est venue des Etats-Unis et de leur système de surendettement des ménages destiné à compenser les bas salaires.
Espérons que ce changement de politique américaine permettra l’émergence d’une gouvernance mondiale avec des règles où la finance sera au service de l’économie et l’économie au service de l’humain.
Cordialement,
Ségolène Royal
* Vous pouvez lire ci-dessous la dépêche AFP, publiée après la conférence de presse de Ségolène Royal le 19 janvier à Washington
« A Washington, Royal retrouve "beaucoup de ses convictions" chez Obama
WASHINGTON (AFP) — L'ancienne candidate socialiste à la présidentielle française, Ségolène Royal, a déclaré lundi à Washington retrouver "beaucoup des convictions" qui sont les siennes chez Barack Obama, dont elle a prévu d'assister à l'investiture de 44e président des Etats-Unis.
« Ce que je trouve formidable dans le discours et la démarche de Barack Obama, c'est à la fois la volonté d'unité et l'idée que chaque citoyen peut participer, doit contribuer à rechercher les solutions du futur », a déclaré Mme Royal lors d'une conférence de presse.
« C'est aussi l'idée que les solidarités et la justice sont des idées-clés de l'émergence d'un nouveau modèle de société", a-t-elle poursuivi. "Donc, je retrouve beaucoup de convictions qui sont les miennes et qui, je pense, vont permettre au monde d'avancer vers la paix, la sécurité et la justice ».
Mme Royal, qui doit assister mardi à la cérémonie d'investiture du premier président noir des Etats-Unis, a dit vouloir « partager avec le peuple américain un moment historique exceptionnel ».
« Il y a un espoir formidable que la nouvelle Amérique, Barack Obama, puisse engager les Etats-Unis d'Amérique vers des solutions qui répondent à la crise » mondiale, a observé la présidente de la région Poitou-Charentes.
« Ce que nous devons chercher ensemble, c'est un nouveau modèle de société, comment on répond à la crise du capitalisme », a-t-elle estimé.
Mme Royal devait être reçue mercredi par le président de la commission des Transports de la Chambre des représentants, James Oberstar, et par un des gouverneurs de la Réserve fédérale, la banque centrale des Etats-Unis. »