Jacques Julliard soutient Ségolène Royal

Publié le par Dominique Millécamps

Sans états d'âme !

La législature agonisante, dont personne n'ose revendiquer le bilan, attend quelqu'un pour l'enterrer. Eh bien ! C'est aux citoyens de le faire. Cela s'appelle l'alternance. Alors, oui, dès le premier tour, Ségolène Royal, sans arrière-pensées !

Ecartons, au moment de voter, tout esprit polémique. Convenons donc que Nicolas Sarkozy n'est pas un facho, que François Bayrou n'est pas un démago et que Ségolène Royal n'est pas une écervelée. Faisons plus, constatons que les trois principaux candidats s'accordent sur le diagnostic : la France ne va pas bien ; c'est un pays encalminé, que seul un chef d'Etat disposant d'un large consentement pourra sortir de sa léthargie. Or, en dehors de toute préférence partisane, j'affirme que, pour mener à bien le programme de réformes qui seul permettrait à la France de reprendre sa marche en avant, Sarkozy ne dispose pas d'un crédit social suffisant et que Bayrou ne dispose pas de la majorité politique nécessaire.

Qu'il s'agisse de l'immigration ou du chômage, un président Sarkozy partirait avec un lourd handicap. On l'a bien vu pendant la campagne, où les quartiers sensibles lui étaient interdits et où les leaders du mouvement social n'ont cessé de lui manifester leur défiance. C'est peut-être injuste, mais c'est ainsi. La politique qu'il conduirait avec la même majorité, mais lestée encore plus à droite, serait la même que celle qu'il a menée pendant cinq ans, avec la même absence de résultats. Un président Bayrou, quant à lui, serait si empêtré dans la recherche d'une majorité, paralysé par les alliances, les combinaisons, les dosages, les compromis, les pesanteurs sociologiques, les pressions contradictoires qu'il sombrerait vite dans l'immobilisme.

Les choses sont tout de même bien simples. Depuis cinq ans, la droite a disposé de tous les pouvoirs : la présidence de la République, la majorité à l'Assemblée, la direction du gouvernement. Sarkozy et Bayrou sont les candidats sortants, ils doivent être jugés à leurs résultats. Oh ! J'entends bien. Ceux-ci sont à ce point médiocres que les deux candidats de droite ont tout fait pour échapper à leurs responsabilités : Sarkozy en se proclamant le candidat de la rupture, Bayrou en prenant ses distances au cours de la dernière année. Curieux tout de même, cette histoire de cinq ans en complète déshérence, ce bilan qui n'est assumé par personne. Chirac et Villepin sont déjà partis, Raffarin n'a cessé d'être absent et les candidats sortants regardent ailleurs. Les électeurs ne doivent pas permettre cette mystification, ils doivent empêcher cet escamotage du cadavre. Cette législature, morte sans sépulture, attend toujours quelqu'un pour l'enterrer. Eh bien ! C'est aux citoyens de le faire. Cela s'appelle l'alternance, et Ségolène Royal est la candidate qui représente cette alternance.

Une présidente Royal, à la différence de Bayrou, disposerait pour réformer la France de trois atouts. D'abord, d'une majorité politique stable, qui se dégagerait à coup sûr autour du Parti socialiste lors des législatives qui suivront la présidentielle. Ensuite , à la différence de Sarkozy, d'un crédit social dû à son positionnement social-démocrate. Nous savons bien qu'un tel crédit n'est pas inépuisable, mais mieux vaut l'avoir au départ. La grande négociation qu'elle a prévue entre les partenaires sociaux au lendemain des élections va dans ce sens. Enfin, elle possèderait une marge de manoeuvre considérable vis-à-vis de son propre parti pour réaliser les compromis nécessaires. Avez-vous noté que le programme socialiste du Mans, victime de malformation congénitale, est mort-né et que Ségolène, grâce à sa liberté et à sa détermination, a les mains libres ?

Les petits candidats de l'extrême-gauche redoutent le « vote utile ». Pour moi, ce que je craindrais le plus, c'est le vote inutile. A cause de son incapacité à donner une suite crédible à la victoire du non au référendum de 2005, l'extrême-gauche s'est déconsidérée auprès de ses électeurs eux-mêmes. Il n'est demeuré de tout cela que la concurrence des appareils et la conjuration des ego. Voter pour l'un de ses cinq candidats peut bien servir à se dorloter la conscience, mais non à poser un acte politique. C'est pourquoi, aujourd'hui, dans le vote socialiste, se rejoignent notre inclination de coeur et l'intérêt bien compris de la nation. Alors , oui, dès le premier tour, Ségolène, sans états d'âme et sans arrière-pensées.

Jacques Julliard

Source :

http://hebdo.nouvelobs.com/hebdo/parution/p2215/articles/a340246-Sans_états_dâme_.html

Publié dans Soutiens

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