On vit une époque formidable

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En m’informant sur l’actualité et en particulier les coups bas qu'on nous concocte pendant la trêve estivale, je m’aperçois que cette époque est vraiment merveilleuse, avec les malades, les vieux, les accidentés… tout ceux qui ne sont pas considérés comme « rentables » pour la société.


D’abord, je me suis penchée sur le cas de Roselyne Bachelot qui a proposé, parmi les mesures pour combler le déficit de la Sécurité Sociale
, de taxer les mutuelles et les assurances complémentaires santé. Celles-ci ont, semble-t-il, fait des bénéfices considérables. Déjà, le cas des mutuelles et des compagnies d’assurance est distinct. Si les 1ères ont bien quelque argent, c’est parce qu’elles ont dû constituer des réserves, rendue obligatoire par la législation européenne sur la sécurité financière. Une fois qu’elles auront versé le milliard demandé pour la Sécurité Sociale, il ne leur restera rien (voir sur son site, la déclaration du Président de la
Mutualité Française).


Quant aux assurances complémentaires, on sait bien qu’elles ne sont pas là par pure générosité.


Madame Bachelot aura beau faire des incantations, les unes comme les autres augmenteront leurs tarifs à terme. On pourrait lui suggérer de taxer les bénéfices phénoménaux des laboratoires pharmaceutiques, des fabricants de matériel médical toujours plus perfectionné, des médecins libéraux qui font des prescriptions de soins très couteux lorsque des techniques plus économiques existent, de tous ceux qui profitent sans déontologie de la maladie et de la vieillesse.


Dans l’ombre de Madame Bachelot, je découvre deux personnages dont le CV laisse rêveur. Il s’agit de François Ewald et Denis Kessler. Marxistes, voire maoïstes pendant leurs prime jeunesse, ils ont vite découvert les vertus des relations haut placées et se sont empressés de se rapprocher du camp adverse.


François Ewald a été conseiller du Medef à l’époque d’Ernest-Antoine Seillière. Il est maintenant Professeur au Conservatoire National des Arts et Métiers, Directeur de Recherche et de la Stratégie à la Fédération française des sociétés d’assurance et occupe différentes fonctions en relation avec son domaine de prédilection : le Risque, avec sans doute les revenus confortables afférents.


Ce monsieur prétend que, si vous n’avez pas acheté votre steak de bœuf au bon endroit, vous avez-vous-même couru le risque que la bête soit malade et que vous le soyez vous-même. Bien sûr, tout le monde peut se permettre de s’acheter de la viande dans les endroits les plus sûrs et généralement trop chers pour les budgets modestes ! De la même façon, si vous êtes informé que votre entreprise utilise des substances nocives et que vous y restiez malgré tout, vous avez pris un risque dont vous devez supporter les conséquences. Evidemment, les emplois courent les rues, on le sait. On peut quand même essayer de se trouver un travail où on ne courra aucun risque (c’est de l’ironie !).


Ces théories n’ont d’autres buts que de couvrir de moins en moins les assurés sociaux. Seuls ceux qui pourront se payer des assurances complémentaires accèderont à des soins de qualité.


Le second personnage, éminence grise de Roselyne Bachelot, Denis Kessler a suivi un cursus similaire au précédent. Ils se sont notamment croisés au Medef. Son grand projet est de liquider l’héritage du Conseil national de la Résistance, dont le programme élaboré en 1944, a
inspiré notre modèle social.


« Liquider l’héritage », ça vous rappelle quelque chose ? Oui, tout est là, tout ce qui a été fait avant n’a pas grâce à leurs yeux.


Je le cite :

« Le modèle social français est le pur produit du Conseil national de la Résistance. Un compromis entre gaullistes et communistes. Il est grand temps de le réformer, et le gouvernement s'y emploie. ».

« Les annonces successives des différentes réformes par le gouvernement peuvent donner une impression de patchwork, tant elles paraissent variées, d'importance inégale, et de portées diverses : statut de la fonction publique, régimes spéciaux de retraite, refonte de la Sécurité sociale, paritarisme... »... « A y regarder de plus près, on constate qu'il y a une profonde unité à ce programme ambitieux. La liste des réformes ? C'est simple, prenez tout ce qui a été mis en place entre 1944 et 1952, sans exception. Elle est là. Il s'agit aujourd'hui de sortir de 1945, et de défaire méthodiquement le programme du Conseil national de la Résistance ! ».

Vous pouvez voir la suite, qui ne vous décevra pas, dans Challenges.


Lors d’un meeting du Medef en 2001, il déclarait déjà vouloir confier la protection sociale à des « opérateurs de soin ». Traduisez par assurances privées.


Toujours sur le même thème des économies à faire faire à la Sécurité Sociale
, je voudrais citer Pierre Le Coz qui, dans une interview au Point, expliquait que nous n’avons plus les moyens de soigner tout le monde au même niveau, en particulier ceux qui ne sont plus rentables.


« L’individualisme a vécu. Nous assistons à la fin d’une période glorieuse de notre histoire. Avec le vieillissement de la population – que l’on n’a pas correctement anticipé – et la multiplication des pathologies associées à l’allongement de la vie, on s’inquiète des dépenses à venir. Nos ressources n’étant pas illimitées, il faut essayer de les répartir de façon plus rationnelle. Aujourd’hui on est bien obligé d’admettre que si la santé n’a pas de prix elle a un coût. Et les médecins doivent désormais tenir compte du prix des médicaments dans leur décision. Notre vision va devenir sacrificielle : il vaut mieux correctement prendre en charge un père de famille de 40 ans, qui est rentable pour la société qu’une personne de 80 ans qui n’a pas toute sa tête »
.


Celui qui énonce ces idées lumineuses à pour titres et diplômes : « 
Agrégé de philosophie, docteur en sciences de la vie et de la santé et vice-président du Comité consultatif national d'éthique ». Oui, vous avez bien lu : « éthique ».


Toutes ces théories, extrêmement inquiétantes, nous amènent à un constat, l’homme est considéré comme une marchandise, il doit être rentable ou disparaître. Ces personnes sont dans les couloirs du pouvoir en place, elles ont les moyens d’appliquer leur programme.


Les membres du Conseil National de la Résistance avaient bien raison de nous alerter en 2004 (voir la vidéo
ici).


Nous avons le devoir de prendre exemple sur eux et d'empêcher la poursuite de ce projet.

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